Muhaarar et Johnny Barnes seront-ils les nouveaux Indian Rocket et Brinkmanship du Sud-Ouest ?

Lui qui vient d’aligner 12 victoires dont une listed cet été, Johnny Barnes réussit un démarrage canon au haras. Le fils d’Acclamation pourrait devenir le futur Brinkmanship du Sud-Ouest, le plus marquant des étalons ayant débuté dans la région, déjà chez Mathieu Daguzan-Garros et qui a fait flores dans les années 80. Pendant ce temps-là, Muhaarar, plus expérimenté fait une razzia et galope dans les traces d’Indian Rocket au Haras des Faunes près de Bordeaux.

 

Il n’est pas simple de porter un étalon dans le sud-ouest au plus haut niveau. En effet, les juments ne sont pas si nombreuses et les plus huppées d’entre elles vont le plus souvent saillir en Normandie ou à l’étranger. Le meilleur étalon récent ayant stationné sur le territoire de l’Ecsso dans la période récent fut sans doute Indian Rocket, qui a vraiment marqué les esprits en étant sacré meilleur père de 2 ans en France en 2008. Celui-ci avait été recruté en cours de carrière par Alain Chopard, qui tente aujourd’hui de répéter l’opération avec Gutaifan et Muhaarar. Ce dernier a été recruté en octobre 2021 pour démarrer la monte en 2022 au Haras des Faunes.

Alain Chopard

 

Le surlendemain même de la visite des agents de Shadwell à Bordeaux, qui n’étaient pas contre déplacer l’ancien crack sprinter car les 2 premières générations 2 puis 3 ans tardait à briller au plus haut niveau, sa fille Eshaada gagnait le British Champions Fillies & Mares Stakes (Gr 1) à Ascot ! Alain Chopard a eu grand peur que Shadwell revienne sur sa décision, mais heureusement ce ne fut pas le cas. Depuis, Muhaarar a accumulé 4 nouvelles victoires de Groupe en 2022, grâce à Trevaunance (Prix de la Nonette, Gr.2, Prix de Psyché, Gr.3), ainsi que Bran et Evening Sun aux Etats-Unis, plus 4 listeds dont 2 cet été en France pour les 3 ans Ataared et Silician Defense. Grâce aussi à une cascade de vainqueurs dans l’hémisphère nord, Muhaarar se hisse à la 5e place du classement général France Sire des étalons actuellement stationnés en France au 31 août, et à la 1e place du classement des 2 ans devant Siyouni et, ex aequo, son voisin de box Gutaifan, Johnny Barnes et Charm Spirit.

 

Indian Rocket

 

Alain Chopard espère bien sûr que Muhaarar soit son nouveau Indian Rocket, l’étalon qui (en parallèle du brave Panis) a propulsé sur le devant de la scène le Haras des Faunes, fondé ex nihio à Arveyres près de Bordeaux par l’ancien marchand de matériel agricole dans les Vosges sur une ancienne ferme bovine en décreptitude avec des juments de modeste facture.

Lorsqu’il a acheté Indian Rocket en fin d’année 2003, sur le ring de Tattersalls pour le compte de Maxime Jarlan, le cheval venait de boucler sa 4e année de monte. Il est passé aux ventes non pas parce que son entourage voulait s’en séparer, mais des suites de divergences administratives entre le propriétaire et le haras qui l’exploitait. Indian Rocket avait déjà sorti en 2003 une très bonne pouliche, Ruby Rocket, gagnante de listed à 2 ans et ensuite placée de multiples courses de Groupes.

Indian Rocket était né croisement ad hoc pour aller vite, celui de l’améliorateur Indian Ridge et de Mummy’s Pet, reproducteur bien connu sur les sprints anglais, père notamment de Reprimand. Indian Rocket a été lui même un coursier très rapide et précoce. Il a gagné un Gr.2 à 2 ans puis s’est classé 3e de la July Cup (Gr.1) dès l’âge de 3 ans, avant de poursuivre sérieusement sa carrière dans les listed entre Dubaï et les Etats-Unis. Il n’a jamais produit une star mais une foule de très bons chevaux précoces qui lui ont permis d’être sacré en 2008 meilleur père de 2 ans en France.Il est mort très jeune, à seulement 15 ans, victime d’une pérotonite. Il a un fils étalon, Captain Chop qui fait la monte « à la maison » aux Faunes, tandis qu’il est père de mère de Goken au Haras de Colleville.

 
Brinkmanship lors de sa victoire dans le Prix Quincey (Gr.3) à Deauville en 1975, sous la selle d’Yves Saint-Martin.

 

Démarrer un étalon dès sa 1e année est un exercice différents. Chez les étalons qui ont profondément marqué l’élevage français en ayant débuté dans le Sud-Ouest, on se rappelle de Solicitor, qui avait commencé sa carrière de course chez Michel Laborde avant de « monter à Paris » chez Miguel Clément pour remporter le Prix Daphnis (Gr.3). Le fils d’Emerson était revenu sur ses terres natales, chez le Dr Yves Frémiot au Haras d’Ayguemorte près de Bordeaux où il a bénéficié du support de la puissante jumenterie de sa propriétaire, la Marquise de Moratalla. Il a donné notamment Go Milord, Rangoon, Solicitude, Some One, et a aussi beaucoup donné en tant que père de mère.

Un tableau de Brinkmanship étalon au Haras des Granges.

 

A peu près à la même époque, au début des années 80, le jeune et bondissant Mathieu Daguzan-Garros qui reprenait les rênes du Haras des Granges près d’Auch dans le Gers, lançait un certain Brinkmanship, imposant cheval noir qui avait gagné les Prix du Muguet (Gr.2) et Quincey (Gr.3) sur 1600 m, sous l’entrainement de Miguel Clément (encore lui).  Ce fils de Go Marching a connu une immédaite réussite. Il a offert gloire et prestige à « MDG » en tant qu’éleveur avec Ginger Brink, lauréat de Gr.1 aux Etats-Unis, le Hollywood Derby, après avoir remporté en France le Prix Jean Prat, à l’époque encore un Gr.2. Brinkmanship a été un grand étalon dans le Sud-Ouest, si populaire et fertile qu’il était liste pleine avec des saillies payés à la réservation pour 15.000 francs, une fortune à l’époque !

 

Mathieu Daguzan-Garros.

 

40 ans plus tard, Mathieu Daguzan-Garros peut espérer avoir une tiré le bon numéro 2e fois. En 2018, il a choisi Johnny Barnes pour son physique, pas très grand mais puissant, solide et parfaitement équilibré, son origine maternelle (fils de la matrone Mahalia), ses performances à haut niveau sur le mile de 2 à 5 ans, mais aussi pour son père Acclamation. ce dernier s’est révélé depuis une 10aine d’année comme un fabuleux père de pères, dont Dark Angel est un exemple parmi tant d’autres.

Et ça marche. Johnny Barnes s’est déjà fait remarquer avec sa 1e génération de 2 ans en 2021, dont le meilleur élément fut Maroon Six, double vainqueur à La Teste avant de conclure 2e du Critérium du Béquet (Listed) sur le même hippodrome. Symptomatiquement, Maroon Six ne fut pas d’un 2 ans ultra-précoce, puisqu’il dure comme le prouve sa dernière victoire le 3 septembre 2022, à 3 ans, toujours sur la piste de la Teste sous la férule de Jane Soubagné.

 

 

La 2e génération de Johnny Barnes, issue de 58 juments saillies en 2019, est encore meilleure. On y trouve notamment Hayejohn qui a gagné le Prix des Jouvanceaux et des Jouvencelles(L) sous l’entrainement de Christophe Escuder, ou encore le désormais célèbre Winemaker qui a gagné un gros maiden en Irlande à 100/1 le 21 août, en sortant de la vente Osarus 2021. A l’édition 2022 de la vente de yearlings d’Osarus, Johnny Barnes était l’étalon le plus représenté avec 10 produits dont 7 vendus, y compris 2 à Christophe Escuder, 2 pouliches présentées par le Haras des Granges à 11.000 € et 20.000 €. Logique, le top entraineur de Marseille, qui a pris depuis 2 ou 3 ans un envergure nationale, avait déjà acquis sur ce ring Hayejohn l’an dernier, pour 10.000 € à l’amiable. Il aura 2 yearlings à la vente de septembre Arqana (lots 7 et 100) et aussi une pouliche de 2 ans au Grand Show Anglo (lot 81).